Tant de temps

poèmes de Bernard Friot * illustrations de Walid Taher
traduit en arabe par Golan Haji

Des temps successifs se succèdent dans la création de ce recueil.
Le temps des carnets à dessin de Walid Taher, qu’il remplit de façon compulsive sur des thèmes libres et qu’il nous montre à chaque retrouvailles : son carnet sur le temps qui passe était dédié à la fugacité des heures, les visages et les montres, les horloges et les bateaux, les passants dans la rue, les chiffres et les aiguilles, une déclinaison sur l’existence, le collectif et l’éphémère.
Puis le temps du poème de Bernard Friot qui commence comme un jeu de mots homonymes :
••• Tant de pierres. Temps des pierres.
••• Tant, tant de temps. Pour les temps des temps.
On aurait pu en rester là, tant de jeux de mots à faire sur le temps !
Mais la ritournelle se diversifie et le rythme s’intensifie. Le poème devient plus complexe, il explore le temps des hommes, tant de jours et temps des nuits. Il plonge dans les chemins de vies, les cris, les corps, tant de joies et temps des guerres. Il y a quelque chose de dramatique soudain, on sent le temps qui presse, il reste tant à vivre, une tension s’installe, on passe par le temps des hivers glacés et des loups affamés, et du silence qui ouvre ou ferme le poème.
Il y a tant à comprendre dans ces jeux de mots sur le temps.

Les dessins de Walid Taher et le poème de Bernard Friot n’ont pas été faits ensemble, mais pourtant ils étaient faits l’un pour l’autre. Nous n’avons eu qu’à trouver le rythme graphique du livre, en jouant sur la transparence des pages, qui relie le temps et le poème, le dessin et son carnet.

Enfin, il y a eu la traduction : comment rendre ces jeux de mots du français vers l’arabe ? Golan Haji a pris son temps : il y a tant de mots en arabe pour dire le temps ! Zaman, dahr, waqt, kharîf, 3asr, joulba, sabt, sabât, fatra, 3ajoûz… sont autant de nuances d’intensité, de moments de la journée, de saisons. Certains de ces mots sont usités aujourd’hui, d’autres sont anciens et plongent dans les origines de la langue arabe. La traduction de Golan Haji est savante et ludique : il joue avec chacun de ces mots pour retrouver un rythme et un sens pour chaque duo de vers. Il explore un genre poétique arabe ancien nommé jinās qui utilise le principe des racines arabes pour les intervertir et jouer avec les sons, les allitérations. Golan Haji réussit ainsi une composition poétique virtuose en arabe contemporain !

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17 x 22 cm | broché | 24 pages | poèmes | avril 2025 | 12 €
isbn : 978-2-494753-24-2